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Le Blog de JM 33500 - LiBoUrNe, HisToiRe d'En ParLeR

8 juin 2007

D'ArTaGnaN à LiBoUrNe en 1650

Souffrain (2) et Guinodie (3) ont relaté, plus ou moins longuement, le séjour que Louis XIV et sa Cour firent à Libourne. Quelques documents, découverts au hasard de la lecture, permettent d'en compléter l'histoire, et de situer dans l'ambiance du moment, la venue dans nos murs du célèbre mousquetaire.

Statue de d'Arpagnan - Musée de Lupiac (Gers)Bien sûr sait-on qu'en août 1650, il fit très chaud à Libourne (4), et que Mademoiselle de Montpensier s'y ennuya fort. M. P. Amiguet (5) écrit:
« Le
1er août, elle (la cour) arrive à Libourne où elle séjournera un long mois. Anne d'Autriche
, plus maussade que jamais, reste enfermée dans son logis et oblige S.A.R. (Mademoiselle) à demeurer auprès d'elle et à faire de la tapisserie. Belle besogne lorsqu'on est jeune et que l'on a envie de grand air, de mouvement, d'espace et d'actions héroïques ! Aussi, la princesse ne peut-elle s'empêcher de regarder avec mépris, voire avec colère cette femme qui passe son temps à dormir, à manger, à dire ses oraisons, et à penser au Cardinal. Comme elle est devenue grosse et lourde cette Reine qui a tant de peine à comprendre l'âme de la France ... Et, Mademoiselle de nous dire avec dépit:
« Il faisait une chaleur horrible, de sorte que pour en moins sentir l'incommodité, la Reine demeurait tout le jour sur son lit sans s'habiller que le soir ; ainsi elle ne voyait personne. J'étais tout le jour dans ma chambre. Le plus grand divertissement que j'eusse était d'écrire à
Paris » ...

« Parfois la Princesse était réveillée à l'aube par le son des fifres et des tambours; c'étaient les troupes du Maréchal de La Meilleraye qui se rendaient devant les murs de Bordeaux. Un autre jour c'étaient des mousquetaires et des chevau-légers qui s'arrêtaient pour bivouaquer. Ces spectacles militaires étaient toujours les bienvenus ; ils rompaient la monotonie des jours, et faisaient une heureuse diversion aux travaux d'aiguille imposés par la Reine ».

Pour
A. Joanne, qui reprenait sans doute les dires de Souffrain, des fêtes brillantes furent données à Libourne pendant le séjour de la Cour (6). Sans doute, l'animation causée par la présence de tant de grands Seigneurs fut-elle une distraction pour les Libournais. Il est aussi bien certain, que longtemps après, on dut parler de l'entrée en ville des souverains, de leur réception à l'église Saint-Jean, des processions auxquelles ils prirent part, de l'exécution de Richon sur la place de la halle. Mais, tout ceci ne pouvait ni faire oublier à Mademoiselle que la guerre continuait, ni l'empêcher de songer à ce que serait la vie à Paris
une fois la paix rétablie.

Bien peu de chose aurait suffi, pour que Mademoiselle ait une autre opinion de notre ville. On connaît son goût très marqué pour l'ortolan, oiseau qui se chasse en Avril-Mai pour la migration de printemps, et en Août-Septembre pour celle d'automne, et qui doit être ensuite engraissé pendant cinq à six semaines. Lorsque la Cour était à
Libourne
, il était ou trop tôt, ou trop tard pour qu'elle puisse s'en régaler.

« N'oublions pas. écrivait
C. Desabrant (7), qu'à l'époque de La Fontaine, le rat des villes se régalait de reliefs d'ortolan, et qu'un royaume fut dédaigné pour des ortolans ... Ce royaume n'était autre que celui de Sa Gracieuse Majesté Charles II d'Angleterre, et il fut proposé à la Grande Mademoiselle. Mais la cousine de Louis XIV, dont le solide appétit n'empêchait pas un sens subtil du palais ... royal, montra un inébranlable attachement à la cuisine française en refusant d'épouser un roi sur la table de qui on ne servait pas d'ortolans! »

Ce projet de mariage datait du début de 1649, soit un an et demi avant le séjour à Libourne.
En
août 1650, Colbert et Foucquet séjournèrent aussi à Libourne
(8).
Nous avons essayé, d'ailleurs sans succès, d'avoir des précisions sur ce sujet, aussi la question reste-t-elle toujours posée.

Portrait de d'ArtagnanMais,
d'Artagnan vînt à Libourne, et son séjour, qui eut des conséquences importantes, semble être passé inaperçu de Souffrain et Gui­nodie. E. Ducéré, que j'ai déjà eu l'occasion de citer (9), écrit:

« Lorsque les troupes royales mirent le siège devant Bordeaux, (l0) Lavrillère écrivit une lettre au corps de la ville de Bayonne, au nom du Roi, lui demandant un renfort de pinasses armées en guerre, pour faire le blocus de la ville par le fleuve. Le fameux d'Artagnan, le mousquetaire, fut chargé par la cour de porter le paquet à Bayonne, et de hâter les préparatifs. Les dix pinasses furent promptement armées et équipées, et placées sous le commandement de M. de Maubec, sieur de Pellicq ».

Il est inutile de dire qui fut
d'Artagnan, mais il semble bon de préciser ce qu'était une pinasse. En effet, les girondins que nous sommes, ont peine à imaginer les paisibles embarcations arcachonnaises armées en guerre, et participant au blocus d'une ville comme Bordeaux. Au XIIIe siècle, les pinasses étaient des navires aussi forts que les caravelles espagnoles : ce fut d'ailleurs l'Espagne qui en enseigna l'usage aux Bayonnais, et aux XVIe et XVIIIe siècles, elles étaient très estimées (11). Les pinasses étaient groupées en escadrilles, et pour le siège de La Rochelle, où les Basques prirent une si large part, Saint-Jean de Luz
se distingua d'une manière particulière : il avait armé à lui seul 15 pinasses chargées de vivres et de munitions (12).

Voici donc, un extrait du rapport de mer du
Sieur de Maubec, rédigé à « Laurmont » le 14 Septembre 1650 (13) :

« ... Je vous diray doncq que sortans de nostre hâvre, nous rencontrâmes M. de Monty dans un grand vaisseau de 32 pièces de canon, et son patache de 12, mais le vent nous ayant été contraire, nous feumes six jours sans pouvoirs aller à Blaye, où arrivé M. d'Artaignan ne voulut perdre temps pour aller en court, qui estoict à Libourne, m'ayant fait l'honneur de me souffrir en sa compagnie, me mena au logis du Roy, où nous trouvasmes fort à propos le Roy et la Reyne ensemble, avec quantité de seigneurs où estoict Monsieur notre gouverneur, lequel me fit la faveur de me présenter à S. M ... après quoi M. d'Artaignan fut d'advis d'aller voir M. le Cardinal... M. de Servien qui estoict avec luy ... me mena chez M. de la Bérillère » ...

On ne peut pas mettre en doute la sincérité de ce rapport. Sous le nom estropié de la
Bérillère, se cache M. de la Vrillère, alors Secrétaire d'Etat, et qui logeait près du Louvre (14). «Il eut peu d'éclat, soit à la Cour, soit dans le Royaume; il ne dut son élévation qu'à son caractère souple, et à une riche succession que lui laissa son beau-père, le fameux Panticelli d'Eimery
(15).
Par contre
M. de Servien
, Abel, était « Ministre, Secrétaire d'Etat, Surintendant des Finances et l'un des 40 de l'Académie Française », Ce fut un diplomate distingué, « naturellement fier et impatient, brusque et rude dans ses manières (16) ».
D'Artagnan foula donc le pavé de nos vieilles rues, et on peut écrire que c'est peu avant le 27 août qu'il était à Libourne. En effet, il amenait les pinasses bayonnaises qui allaient participer au siège de Bordeaux, et ce renfort étant arrivé, le Roi quitta Libourne
pour aller à Bourg pour être plus près du théâtre d'opérations.
Ce séjour est donc d'une importance capitale pour l'Histoire de la Fronde, car dix jours plus tard, le Roi faisait son entrée dans
Bordeaux
(17).

Mais, il est possible, que ce soit à
Libourne que d'Artagnan ait reçu la mission d'aller à Bayonne. Un compte à rebours va en donner la preuve:

- le Roi quitte Libourne le 27 août,
-
d'Artagnan y est arrivé le 25 environ, il a quitté Blaye
le même jour,
- 6 jours de navigation ont été nécessaires pour aller de
Bayonne à Blaye : l'escadrille a donc appareillé vers le 19
,
- les pinasses furent promptement armées et équipées : si une dizaine de jours s'écoula entre la réception de l'ordre royal par la ville de
Bayonne et l'appareillage, c'est que d'Artagnan remis l'ordre vers le 9
,
- la Cour étant arrivée à
Libourne le ler août, c'est pendant cette longue semaine que d'Artagnan reçut sa mission, et trouva le temps de faire le déplacement.

Ce n'est donc pas un séjour, mais bien deux, que d'Artagnan fit à Libourne.

Suivant le Roi jusqu'à Bourg, et parlant de la réconciliation qui eut lieu dans cette ville entre Louis XIV et la princesse de Condé, Gui­nodie (18) cite la comtesse de Tourville, parmi les personnes accompagnant la princesse.

Sachant qu'ii y eut au moins deux familles qui portèrent ce titre, l'une originaire de Bretagne, l'autre de Lorraine, on est en droit de se demander de laquelle il s'agit. Jean de La Varende vient heureusement à notre secours.
Cette
comtesse de Tourville était née Lucie de la Rochefoucault. Veuve en premières noces d'un Duras, elle avait épousé en secondes noces César de Tourville
: ils furent les parents du Maréchal (19).

« En
1649, quand Anne d'Autriche voulut s'assurer de la princesse de Condé comme otage, écrit-il, c'est Madame de Tourville, alors première dame d'honneur qui organisa la résistance, et prit la part la plus importante dans la farce qu'on joua au pauvre M. du Vouldy, chargé de la garde des captifs. On sait qu'au lieu du petit duc d'Enghien et de la princesse, on lui fit voir une jeune anglaise et le fils du jardinier, pendant que Madame de Condé et l'enfant ducal galopaient vers Bordeaux. Madame de Tourville fit réussir la fuite. Année sur année, Lude de Tourville, la comtesse de Tourville par courtoisie, allait suivre le sort des Condé
, sans jamais les abandonner» (20).

Sans doute me suis-je laissé entraîner bien loin de mon sujet. J'espère que cette étude des aspects peu connus du passage de la Cour à
Libourne vous inclinera à l'indulgence.

                                                                                             B. MONTOUROY.

(1) Doit-on dire Artagnan ou d'Artagnan, comme l'écrit A. Dumas. Il semble que ce soit une faute, la particule ne devant être employée que lorsqu'il est fait usage d'Un titre ou prénom.
(2)
SOUFFRAIN
. Tome III, p. 30 et s.
(3)
GUINODIE
, 2" éd. T. l, p. 226.
(4) Ibid. T. l, p. 230.
(5)
Philippe AMIGUET. La Grande Mademoiselle et son siècle d'après ses Mémoires. Albin Michel. Paris 1957
, p. 170 et 171.
(6)
Adolphe JOANNE : De Paris à Bordeaux (collection des Guides Joanne), 3" éd. Paris. Hachette 1867
, p. 288.
(7)
Catherine DESABRANT. Célébrité n'est pas chance : l'ortolan. Dans Bêtes et Nature, la revue du monde animal n° 46 octobre 1967. Cet article est à rapprocher de celui paru dans la R.L. n° 2 août 1898
, p. 26 et 27.
(8) R.H.A.L., T. Xx...XV, n " 123, p. 2.
(9) R.H.A.L., n° 127, p. 16, note 6.
(10) Histoire topographique et anecdotique des rues de
Bayonne. E.DUCERÉ
, T. V, p. 135.
(11) voir le LAROUSSE à ce mot.
(12)
Pierre HARISPE. Le Pays Basque. Paris 1929
. Payot, éd. p. 135.
(13)
DUCERÉ
. Ibid. p. 136 et suivantes.
(14)
SOUFFRAIN
, p. 30.
(15) Dictionnaire universel, historique, critique et biographique par une Société de Savants français et étrangers. 9" éd. Paris. Prud'homme Fils. 1812, T. XVIII, p. 147.
(16) Ibid. T. XVI, p. 158.
(17) Courrier Français du Dimanche. Edition du Libournais, n. 1257 du
19 octobre 1968. Jehan de GUIENNE. Personnages célèbres du Bordeaux
de jadis.
(18)
GUINODIE
, 2" éd. T. 1, p. 232.
(19) Pour l'ascendance du
Maréchal de Tourville
, voir aussi Miroir de l'Histoire n° 225, page 6, question n° 120.
(20)
Jean de La VARENDE. Le Maréchal de Tourville et son temps. Paris. Ed. de France 1943
.


Escalier menant à la Statue  Statue de d'Artagnan

Originaire de Gascogne, il n'y a rien d'étonnant à ce que la principale ville de la région, Auch, ait élevé une statue à l'homme qui représente le mieux l'esprit gascon. Erigée sur le premier palier d'un escalier monumental de 234 marches, la statue de d'Artagnan se dresse fièrement là depuis son inauguration en 1931.
Un point de passage obligé pour les amateurs du célèbre mousquetaire...

Iconographie. - Le Journal des Veillées du Pays de Bigorre publié par la Société Bigourdane d'Entraide Pédagogique. Hiver 1933-1934, n° l, reproduit la photographie de la statue en bronze de d’Artagnan, érigée à Auch, sur l'escalier monumental le 12-7-1931, œuvre du sculpteur Firmin Michelet, auquel est consacrée une notice intéressante, sous la signature de Georges Ferrero.

Extrait de la Revue Hist. Et Arch. Du Libournais 1969 à 70.

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28 mars 2007

1822 Sur la RouTe BorDeauX - LiBoUrNe

Voiture accélérée de Bordeaux pour Libourne
...AVIS... Le public est prévenu qu'à dater du 16 juillet, il partira tous les jours à 6 heures précises, du quai de la Douane n° 163, ancien bureau des jumelles, une voiture accélérée, bien suspendue, qui fera la route de Libourne en moins de 3 heures 1/2. (Extrait du Mémorial Bordelais du lundi 15 juillet 1822, communiqué par M. Bernard Ducasse).

Extrait de la Revue S.H.A. du Libournais 1953 à 54 p. 59

De nos jours, ce même trajet d'environ 30 kilomètres s’effectue en moins de 30 minutes en respectant les limitations de vitesse bien sur ;o)

25 février 2007

La PieRRe à BaSSin de LuSSaC-de-LiBoUrNe

Sur la Boucle des Celtes Lussac 2007

A l'extrémité sud-ouest du bois de Picampeau, commune de Lussac, se trouve un curieux monument décrit dans la Revue Historique et Archéologique du Libournais, tome I, p.19 (Abbé Bresque et d.-.A. Garde, « Lussac de Libourne et l'abbaye de taise »). La description suivante est tirée de la Revue H.A.L. 1951 à 53 p.88 à 94.  

La PieRRe à BaSSin de LuSSaC-de-LiBoUrNe

La pierre d'évier ou pierre des martyrs est un énorme bloc de calcaire de six mètres de longueurs sur une largeur maximum de quatre mètres, apparemment détaché du banc de rocher qui forme le plateau de Picampeau. Il est incliné à l'ouest sud-ouest. Dans son milieu et sur la face inclinée qui forme table est creusée une sorte d'auge en forme de trapèze allongé dont les bases espacées de quatre-vingts centimètres mesurent respectivement trente et soixante-deux centimètres. De la petite base un trou circulaire fait communiquer le bassin avec une rigole qui descend jusqu'à l'extrémité de la table. Par dégagement de la pierre, le bassin se trouve entouré d'un fort bourrelé. Aux extrémités est de la table existent deux trous cubiques de quinze à vingt centimètres de côté et dans la partie basse deux trous demi-sphériques.

Rigole de La PieRRe à BaSSin de LuSSaC-de-LiBoUrNe

Dans la Guyenne Historique et Monumentale (1842), Ducourneau signale la pierre des sacrifices de Lussac qu'il prend à tort pour un dolmen ; il donne un dessin tout à fait fantaisiste du monument. Dans l'Histoire de Libourne (1845) Guinodie dit quelques mots de la pierre de Lussac, visiblement inspirés par la monographie de Ducourneau (Guinodie, Histoire de Libourne, 1845, tome III, p. 242.).

Dans le Bulletin de la Société Archéologiquede Bordeaux (Bulletin Société Arch. de Bordeaux, 1876, tome III, p. 55, 56). Léo Drouyn s'attache d'abord à réfuter les dires de Ducourneau et donne à son tour une description inexacte du monument. « Des rigoles plus étroites, partant de la rigole principale se dirigent dans trois sens différents vers un des bords du bloc, une d'elles côtoie le flanc méridional de la cuvette. Un dessin joint à l'article montre bien les trois « pseudo-rigoles » partant de la rigole principale. On se demande comment un archéologue aussi distingué que L. Drouyn, qui nous a laissé des descriptions si complètes de nos vieilles églises romanes et des dessins si exacts de leurs sculptures, a pu induire ses lecteurs en erreur d'une façon si manifeste. En effet, les trois rigoles auxiliaires qui, nous le verrons, ne sont pas des rigoles, ne communiquent pas avec la rigole principale. Le dessin donné par L. Drouyn est tout aussi fantaisiste que celui de Ducourneau.

Nous ne signalerons que pour mémoire la brochure de M. Augey, La destination du mégalithe de Lussac assimilant la pierre à bassin un étalon de mesure de contenance (Edmond Augey, La destination du mégalithe de Lussac, brochure, Féret, Bordeaux, 1943).

Nouvelle étude de la pierre à. bassin de Lussac.

Le 2 mai 1943 nous avons procédé à un nouvel examen de ce monument en compagnie de nos collègues de Sarrau et docteur Bastin de Longueville.

Nous avons constaté l'existence d'une seule rigole écoulant le bassin et, sur la face sud de la table de pierre, la présence de trois sillons (le mot est du docteur Bastin) qui ne communiquent point avec la rigole.

Nous avons alors émis une hypothèse. La partie nord de la table a été aplanie, dégageant nettement le bassin et sa rigole; la partie sud est encore à l'état brut. Les sillons semblent être le résultat d'un travail préparatoire pour faciliter l'enlèvement de copeaux de pierre dans le but d'obtenir un dégagement identique à celui de la partie nord, travail qui ne fut pas continué. Nos collègues ne nous ont pas contredits.

Le docteur Bastin de Longueville fut formel: « Nous sommes en présence d'un monument druidique. »

Considérations qui ont motivé les fouilles. - L'opinion du docteur Bastin de Longueville sur l'utilisation du monument rejoint donc celles de Guinodie et de Ducourneau. Or si l'on dépouille la monographie de Ducourneau des développements romanesques auxquels il s'est complu et qui ont pu faire douter du sérieux de ses affirmations, il demeure que cet auteur a effectué des sondages au pied du monument, que ses fouilles ont livré des tessons de céramique qui attestent l'enfance de l'art (Ducourneau, Guyenne Historique et Monumentale 1842, loure I, p.). Guinodie a confirmé cette découverte : « Des débris de vases antiques ont été trouvé autour d'elle, les prêtres gaulois les employaient sans doute dans les cérémonies (Guinodie, ibidem).

Que Lussac ait été un centre gaulois très actif, nul ne le contestera. Une importante villa gallo-romaine y existait aux Ier et IIème siècles, d'après les vestiges retrouvés (J.-A. Garde, Le gallo-romain au musée de Libourne. Revue Rist. Arch. du Libournais, tome XVI, p. 29 à 32).

On fait généralement dériver le nom de Lussac du patronyme d'un grand propriétaire gallo-romain Luocius, possesseur de la villa. Mais une seconde hypothèse a été formulée d'après laquelle Lussac dériverait de incas et signifierait alors « le lieu du bois sacré ». C'est à un kilomètre de ce bois que le bourg de Lussac a été bâti (hypothèse de Jean Ducasse. Revue Hist. 1 rch. du libournais, tome XIV, p. 86 - 1946).

Enfin, c'est dans la commune limitrophe de Tayac, exactement à 6 km 500 du bourg de Lussac que fut faite, en 1893, la trouvaille retentissante d'un trésor gaulois : torque en or massif (au musée de Bordeaux), 73 lingots, 325 statères ou quarts de statères des peuplades gauloises des Arvernes et des Bellovasques (Dupuch, Revue Libournaise littér. Hist. Artist. Arcltéol., tome 11, 1900, P. 29).

La découverte de Tayac, les données étymologiques sur le nom de Lussac, l'importance du lieu à l'époque gallo-romaine militaient déjà en faveur de l'hypothèse docteur Bastin, Ducourneau, Guinodie. D'autre part des prospections préalables entreprises par nous dans les vignes qui entourent le bois de Picampeau n'avaient donné aucun résultat, pas plus que l'examen des terres rejetées par les lapins de garenne le long du banc de rocher. Il devenait donc évident que si des fouilles exécutées sur la terrasse sise à flanc de coteau, au pied même du monument, donnaient soit de la céramique, soit des silex taillés, soit des objets en bronze ou en fer, nous aurions la quasi-certitude que ces objets se rapporteraient à l'utilisation de la pierre à bassin et pourraient dater le monument.

Telles sont les considérations qui ont provoqué les fouilles dont voici le procès-verbal.

Procès-verbal et fouilles

Ce 6 mai 1949, avec l'autorisation et en présence du propriétaire du terrain, M. Boisdron, demeurant à Lussac, nous soussignés, membres de la Société Historique et Archéologique de Libourne :  

Ducasse Bernard, demeurant à Lussac ; Garde Jean-André, demeurant à Saint-Denis-de-Pile; Magère Raymond, demeurant à Saint-Denis-de-Pile, avons exécuté des fouilles sur la terrasse mesurant 4 mètres x ' mètres, sise au-devant de la pierre à bassin de Picampeau, commune de Lussac, connue sous le nom (la pierre d'évier ou pierre des martyrs.
Une tranchée ouverte clans le prolongement de la rigole du bassin, par des terrassiers sous nos ordres, ne donna aucun résultat, mais perlait d'atteindre le rocher ou un remblai de rochers à quarante centimètres de profondeur.

Avec le consentement de M. Boisdron nous entreprenions alors de vider complètement la terrasse jusqu'à la sole rocheuse et de rejeter la terre dans le déblai après l'avoir criblée.
Ce travail lions permit de ramasser une trentaine de tessons de poterie disséminés sur la terrasse, dont un fragment ornementé avec portion de col de vase rencontré à la plus grande profondeur.
Absence complète de silex taillés ou d'éclats de taille.
La céramique fera l'objet d'une étude spéciale, mais d'un premier examen, nous avons unanimement considéré qu'elle était antérieure à l'époque gallo-
romaine.
Les fouilles terminées nous avons été amenés à observer : que le monument n'est ni un dolmen (absence de supports), ni un menhir renversé, mais uniquem
ent une pierre à bassin.
Qu'une seule rigole écoule les liquides provenant du bassin ainsi que l'ont dit Ducourneau et Guinodie; que les trois rigoles accessoires signalées par Léo Drouyn, toutes sur le côté sud du monument ne sont pas des rigoles, mais des sillons irréguliers - selon l'expression du docteur Bastin de Longueville - creusés dans l'intention évidente d'aplanir cette partie de la table de pierre ainsi 
que cela fut fait pour la partie nord.
Enfin deux trous cubiques creusés aux angles de la partie supérieure de la table semblent d'une époque relativement récente. Par contre, deux trous demi-sphériques creusés dans la partie la plus basse pourraient être contemporains du bassin.
Des signes gravés dans le fond du bassin sont des initiales dues aux soldats -américains qui ont tenu garnison à Lussac en 1918-1919.  

Fait à Lussac-de-Libourne, le 6 mai 1949.  


Examen de la céramique

1° Tessons provenant d'une coupe plate, épaisseur dix millimètres. Pâte noire à l'intérieur, gris-blanchâtre à l'extérieur. Dégraissant composé de grains de quartz et de petits fragments de silex. De la même pâte quelques tessons de six millimètres d'épaisseur.

2° Pâte brun-rougeâtre. Dégraissant composé de sable lin. Dans, ce lot partie inférieure d'une anse de petite dimension, largeur 20 millimètres, épaisseur six millimètres.

3° Tessons divers dont l'un brun sur une face, noir sur l'autre.

4° Neuf tessons de vases peu épais (quatre à cinq millimètres). Pâte blanchâtre, tessons montrant des traces de lissage avec poignée d'herbe. Dégraissant fin et irrégulier.
L'absence d'ornementation dans la poterie de ces quatre catégories rend difficile une classification rigoureuse. La comparaison avec la céramique néolithique si nombreuse au camp du Pétreau et l'absence complète de silex nous font rejeter de cette époque les tessons de Lussac. Le tout est à rapporter à la protohistoire.

5° Mais les fouilles ont précisément donné un fragment de la partie supérieure d'un vase ornementé. Epaisseur six à sept millimètres. Pâte noire à l'intérieur, rouge-brun à l'extérieur. Dégraissant de sable fin. Le col est lissé à l'extérieur et présente un cordon de petits creux ovales. La panse du vase est décorée de nervures longitudinales limées par l'usage, de l'ordre de un millimètre de large, partageant la surface du vase en bandes de quatre millimètres.

Déchelette représente un vase à nervures longitudinales (fig. 677k qu'il situe au second âge du fer - La Têne III).
C'est incontestablement à l'âge du fer que remonte le vase de Lussac et si l'on considère que les Celtes étaient en place en Gaule dès le début de l'âge du fer (Lot) cette poterie appartient bien à l'époq
ue gauloise.
Au cours de l'excursion de la Société en pays Blayais, le 29 mai 1949, nous avons présenté cette pièce au savant archéologue A. Nicole qui, sans hésitation aucune, nous a déclaré: « Cette poterie est gauloise. » Au cours de la présentation en séance M. Ferrier Jean s'est rangé à cette opinion.


CONCLUSION

Des considérations qui ont précédé les fouilles. Des résultats donnés par celles-ci, 

Aussi bien les témoignages écrits sur l'utilisation de ces pierres, depuis l'antiquité à nos jours, abondent. Depuis la Bible où l'on trouve dans le premier livre des Rois « Un jour qu'Adonis immolait des moutons, des bœufs et des veaux gras à la Pierre qui glisse, qui est près de la source du Foulon... », jusqu’au manuel de Saintyves cité plus haut, où nous lisons p. 378: « A Sid-Elkahir (Sud Algérien), les jours de fête et de pèlerinage on sacrifie toujours le bœuf paré de fleurs et de papier doré sur la vieille pierre des sacrifices, avec large bassin circulaire ».
La pierre à bassin de Lussac, monument de l'antiquité unique en Gironde, mérite d'être préservée des injures des inconscients. La question de son classement comme monument historique, qui n'a pas jusqu’'ici été prise en considération par les Beaux-arts doit être reconsidérée à la suite de l'heureux résultat des fouilles effectuées.
On peut considérer la pierre à bassin de Lussac comme une pierre à sacrifice de l'époque gauloise.
Un peu trop vite, semble-t-il, il avait été établi comme axiome que les pierres druidiques avaient disparu avec les derniers romantiques. Il appartenait aux préhistoriens d'en opérer la redécouverte. Au cours de la séance du 10 avril nous avons entretenu nos collègues de plusieurs monuments similaires signalés par le Corpus ou Folklore préhistorique de Saintyves. Marcel Baudoin est là-dessus catégorique : « Les anciens autels n'étaient que des pierres à bassin ».

Jean-André GARDE.

InFo sur la PieRRe à BaSSin de LuSSaC-de-LiBoUrNe

25 février 2007

AliÉnoR, FeMMe De RoGeR de LeYBouRNe

Nous empruntons à la plume savante de M. J.-Aug. Brutails, directeur des archives départementales de la Gironde, la description de cette tombe plate découverte il y a quelques années dans un petit étang, au lieu de Cassecrabey, près de Créon (arrondissement de Bordeaux).

Pierre tombale d'Aliénor

« Cette dalle est dans un médiocre état de conservation; elle a été brisée en deux, peut-être par des lavandières qui en ont employé les deux morceaux pour laver le linge. La moitié inférieure est détériorée par en bas; la partie supérieure est écornée par en haut, à droite; la pierre est rongée sur plusieurs points, et l'épitaphe a malheureusement beaucoup souffert. »
La dalle mesure 0m165 d'épaisseur. La face est encadrée d'une double moulure creuse, large de 0m075, taillée dans un épannelage en biseau et qui est d'un excellent effet. Ces moulures ont à peu près disparu aux deux extrémités supérieure et inférieure. Le champ mesure, entre les moulures, 1m56 de long; la largeur est de 0m55 en haut et de 0m30 en bas.
L'effigie est des plus curieuses. Elle représente une femme nue, les mains jointes sur la poitrine. Le milieu du corps, depuis la ceinture jusqu'aux genoux, est dissimulé derrière un écu, chargés de six lions posés 3, 2 et 1. Le dessin, gravé au trait, n'est pas mauvais. Certaines parties, comme les bras, sont même convenablement traitées. Mais ce qui est surtout intéressant dans cette œuvre, c'est que l'artiste ait représenté une personne nue. Le XIIIe siècle n'admettait guère la nudité que pour ces petits corps sans sexe qui figuraient-rame du défunt. Les imagiers de ce temps ne cherchaient pas encore le réalisme que les sculpteurs du XVe siècle rendirent parfois avec tant de puissance. Sur ce point notre ciseleur a fait preuve d'un dédain quelque peu hardi des conventions de son temps : il a dépouillé de tout vêtement la noble femme dont il devait reproduire les traits, et il a même, autant qu'on en puisse juger par certains détails, visé au réalisme. A ce point de vue, la tombe plate de Cassecrabey est un document précieux pour l'histoire de l'art.
On remarquera que, pour les lions des armoiries, l'artiste ne s'est pas contenté d'indiquer d'un trait la silhouette; le lion tout entier est gravé en creux. Sans doute, ce creux était rempli de mastic de couleur et le champ de l'écu était peint. L'épitaphe, dont le début est indiqué par une croix, part de l'angle supérieur gauche. Elle est en jolies majuscules. Voici ce que j'en ai déchiffré. J'ai écrit en italiques les lettres qui sont représentées par un signe abréviatif, et entre crochets celles qui, ayant disparu accidentellement en tout ou en partie, ont pu être reconstituées :

HIC JACE[T A]...... DOM/NI ROT[GERII] DE LIBURNA, MILIT[IS]......
OBIIT QUARTO IDUS OCTOBRIS
ANNO DOMINI M.CC.LXV. ANIMA EJUS REQU[I]ESCAT IN PACE.

Il s'agit probablement d'Aliénor, femme de Roger de Leybourne, lieutenant du roi d'Angleterre. Roger mourut en 1271. Aliénor, fille de Robert de Vipont, était veuve de Roger de Quincy. A la vérité, après l'A initial de son nom, subsiste un trait courbe qui annonce plutôt un C, un E ou un G. Mais cette constatation est vague et incertaine, parce que la pierre est très dégradée sur ce point.
On peut donc admettre que cette dalle a recouvert la sépulture d'
Aliénor de Vipont, femme du lieutenant du Roi, Roger de Leybourne, dont le nom parait présenter avec celui de la ville girondine de Libourne une parenté difficile à préciser. » (Bulletin monumental 1896, 7ème série, tome 1er).
Cette parenté, quoique difficile à préciser,
M. Brutails l'admet donc, nous savons même qu'elle lui paraît incontestable. Telle a été aussi l'opinion de R. Guinodie, de Martial et Jules Delpit. Les ingénieuses étymologies tirées de la situation géographique de notre ville, Ellac-Borna, Islae-Borna, nous semblent tomber du reste, sans contestation possible, si l'on veut bien considérer que le nom de Leyburn apparaît seulement, tout-à-coup, à la fin du XIIIème siècle.
Les armoiries gravées sur la pierre tombale de
Cassecrabey sont bien celles de la famille de Leybourne. (v. The general Armory of England, Scotland, Irelandand Wales, de sir Bernard Burke, Londres 1878). A..... femme de Ratmond de Libourne, morte en 1470, fut enterrée à La Sauve; ses armes étaient six lionceaux posés 3, 2 et 1. (Histoire générale de Courcelles, alliances, t. 3 art. Castillon p. 13). Il est infiniment probable que la tombe d'Aliénor provient également de La Sauve.

23 février 2007

L'ÉgliSe De L'ÉpiNette eT SeS AlenTourS

ChaPeLLe De L'ÉpiNette en 1865

Nous reproduisons ci-après une très intéressante notice qui a paru, en Septembre 1897, dans un journal de notre ville, sous le voile de l'anonyme. Ce travail avait pour auteur notre compatriote M. H. Vinson, le magistrat distingué, qui, en dehors de ses occupations professionnelles, s'était adonné avec tant de succès aux études de bibliographie et d'histoire. C'est d'ailleurs la dernière œuvre qui soit sortie de sa plume; il l'a écrite, un mois environ avant sa mort, dans cette propriété de sa famille où il était venu prendre une retraite studieuse, au milieu des souvenirs de son enfance et des affections de sa jeunesse.

L'an 799, Charlemagne était parvenu à l'apogée de sa puissance. Il avait toujours entretenu des relations utiles avec la papauté; à ce moment, le pape Léon III voyait sa situation menacée; il eut recours à Charlemagne, qui résolut d'aller à Rome pour lui venir en aide. Il s'y rendit avec ses principaux officiers et y convoqua un Concile ; Léon fut absous et put reconquérir toute son autorité.
Pour témoigner sa profonde reconnaissance, Léon imagina une superbe surprise.
Le jour de la fête de Saint Pierre, pendant que Charlemagne était en prière, il s'approcha du roi franc, lui mit le manteau de pourpre sur les épaules, la couronne d'or sur la tête et le proclama Empereur d'Occident. Peut-être le Monarque ne fut-il pas aussi surpris que le rapportent les Chroniques, et l'arrangement des choses fut-il un simple secret d'Etat. 

L'Empereur d'Occident, ainsi proclamé, fut amené à traiter avec l'Empereur d'Orient an sujet des limites de leurs empires. La grande autorité n'était pas du côté de l'Orient, aussi c'est de ce côté que vinrent vers Charlemagne les manifestations empressées et les hommages multipliés.
C'est à ce moment que se place l'envoi par le Patriarche de Jérusalem d'un clou du crucifiement, de plusieurs épines de la couronne du Calvaire et d'un fragment important de la croix du Golgotha. Comment ces reliques avaient-elles été trouvées, conservées, protégées? La légende pieuse proclame leur réalité et les foules heureuses s'en contentent.
Charlemagne, consacré Empereur d'Occident le 25 décembre 799, mourut le 28 janvier 814; c'est donc dans cet intervalle que se place ce magnifique envoi, probablement dans les premières années qui suivirent la délimitation des deux Empires.
On sait que le grand Empereur ne négligeait, dans ses voyages incessants, aucune partie de son vaste Empire. Il parcourut plusieurs fois l'Aquitaine et avait été frappé du parti stratégique qu'on pouvait tirer du tertre de Fronsac. 

Au confluent des deux rivières de l'Isle et de la Dordogne, à l'Est, se trouvait une agglomération populeuse qui possédait pour le culte un édifice sous le vocable du grand apôtre, d'abord incrédule, Thomas.

Les religieux qui le desservaient entrèrent, sans doute, dans les vues du grand Empereur et lui inspirèrent des sentiments préférés, car il crut devoir les gratifier d'un bienfait inestimable: il leur donna une des épines de la couronne du divin Supplicié. Plus tard, une Confrérie très respectée fut chargée de sa garde et du soin de ses exhibitions; ce fut la Confrérie privilégiée dite de Saint-Clair.

La Sainte-Épine: épine de la couronne du Christ donné par Charlemagne à l'Église Saint-Thomas (visible à l'Église Saint-Jean le jour du Patrimoine)

Les siècles s'écoulent; nous arrivons à Éléonore de Guienne (1122-1203). Quelle part eut-elle à la Chronique de l'Épine ? Nous tombons dans les obscurités et les probabilités de l'histoire.

Ce qui est vraisemblable, c'est que, dès cette époque, des trois chemins qui rayonnaient hors de Libourne, du côté opposé à la rivière : chemin de Condat, chemin de Saint-Émilion, chemin de Lyon (la route de Paris étant par Saint-André-de-Cubzac), e plus important et le plus fréquenté était certainement celui de Saint-Émilion.
La population s'accroissait au confluent des deux rivières et s'épandait sans cesse au dehors; à une époque inconnue fut bâtie sur la route de Saint-Émilion, à cinq ou six cents pas hors des murs de la ville, une chapelle modeste. On a voulu aussi y plaquer la légende obligatoire, le chêne, les colombes, les étoiles, la croix; mais cette légende n'a jamais été fort répandue et elle n'a point occupé la tradition.
Ce qui est plus probable, c'est qu'Éléonore de Guienne, devenue reine de France par son mariage avec Louis VII, dit le jeune, roi très pieux et très pratiquant, avait une manière de vivre que, par suite de son mariage ultérieur avec le roi d'Angleterre Henri II, on pouvait trouver un peu trop de flirt. Pour plaire à son jeune époux, pour bien se préparer à leur voyage en Terre Sainte, et peut-être aussi pour quelque mécontentement vis-à-vis des religieux de St Thomas, elle leur fit retirer l'Épine confiée à leur église et la fit déposer dans la chapelle jusqu'alors sans nom, désignée simplement comme chapelle de la Vierge, et qui commença à porter le nom de l'Épinette.
Éléonore, de retour de Jérusalem, ne satisfaisait plus son jeune époux, devenu plus sanctifié et plus rigoureux. Il obtint le divorce contre elle. Six semaines après, elle épousait Henri II, roi d'Angleterre, et lui apportait en dot la Guienne, la Gascogne, la Saintonge et le Poitou, dont elle avait hérité de son père, Guillaume X, dernier duc d’Aquitaine.

La Guienne devenue anglaise, les guerres dévastèrent la région ; le chemin de Saint-Emilion n'était pas sûre, l'Épine dût être rapportée dans l'église Saint Thomas. Les années s'écoulent, la ville est régulièrement reconstituée (1270). C'est une petite place forte avec tours, créneaux, poternes et fossés.

Avant de succéder à son père Édouard Ier, son fils fut le premier qui porta le nom de Prince de Galles; il aimait le séjour de la Guienne. Sa femme, la Princesse de Galles, se laissa aller à une préférence marquée pour la ville refaite par Édouard V ; elle fit rebâtir la chapelle de l'Épinette (1364), la fit consacrer solennellement par l'Archevêque de Bordeaux, Hélie de Bremont, lui conféra des revenus et lui attribua les bénéfices du Priourat.
Les Cordeliers de
Libourne desservirent la chapelle de l'Épinette, et l'abbé qui en était plus spécialement chargé portait le titre de Prieur de l'Épinette.

Cependant l'Épine n'avait pas été rapportée de l'église Saint Thomas à l'Épinette; elle n'y est jamais revenue et n'y est plus représentée que par un symbole, une image de pierre.
Chaque année, l'Épine était processionnellement transportée de l'église St Thomas à la chapelle de l'Épinette. Cette cérémonie, à laquelle le Maire et les Jurats assistaient, se faisait en grande pompe, au milieu d'une foule considérable.

Dans la suite des temps, elle fut suivie, en 1365, par Duguesclin ; en 1462, par le roi Louis XI et, en 1469, par Charles, frère dix Roi, qui fit faire pour l'Épine une jolie petite châsse en argent.
Cette châsse fut déposée aux archives de l'Hôtel de Ville et, par délibération des Jurats du
15 décembre 1505, le curé de Saint Jean, Minard
, en fut constitué gardien.
Mais cet office resta pour lui une sinécure, l'église St Thomas ne voulut jamais consentir à se séparer de la précieuse relique.
La chapelle de l'Épinette perdit peu à peu de sa vogue et de sa popularité. En 1563, pendant les guerres de la Réforme, elle fut absolument dévastée et pillée. Reconstituée quelques années plus tard, lors de la paix des cultes, elle continuait à être desservie par les religieux de Saint Thomas, et la Confrérie de Saint Clair se gardait bien d'oublier ses privilèges relatifs à la Sainte Épine. Pourtant, en 1609, le 5 avril, par ordre du cardinal de Sourdis, archevêque de Bordeaux, l'église Saint Thomas dut abandonner son précieux dépôt; l'Épine fut transportée processionnellement dans l'église paroissiale de Saint Jean et un procès-verbal détaillé en fut authentiquement dressé.

Mais la Confrérie de Saint Clair n'accepta pas ainsi sa dépossession; elle porta l'affaire devant le Parlement. Le Maire et les Jurats prirent parti pour Saint Jean. Le Parlement rendit un arrêt par lequel il décida que le jour de Saint Clair l'Épine serait portée à Saint Thomas et y resterait pendant trois jours offerte à la vénération des fidèles. Le Maire et les Jurats, en commémoration de cette attribution de possession intermittente, instituèrent une procession annuelle le premier dimanche de la Passion. L'itinéraire de cette procession nous a été conservé: elle sortait le matin de St Jean, prenait la petite rue Périgueux, passait sous le couvert de l'Hôtel de Ville, puis suivait la Grand'rue, la rue de Guîtres, la rue Saint Thomas, stationnait dans l'église Saint Thomas, traversait la place, reprenait la petite rue Périgueux et rentrait à Saint Jean.
L'Épine avait été placée dans une baie creusée dans le mur, près de l'autel, du côté de l'Évangile; trois clefs servaient à la fermeture de la baie, une pour le Maire, une autre pour le Curé de Saint Jean et la troisième pour le Syndic de la Confrérie de Saint Clair.

Privée de sa relique sacrée, à laquelle elle devait son nom, la chapelle de l'Épinette qui, jusque-là, avait été desservie par les religieux de Saint Thomas, fut, en 1609, par décision du cardinal de Sourdis, remise au clergé de Saint Jean, qui désormais en demeura chargé.
Mais elle n'était point négligée et continuait à être l'objet de pieuses offrandes. Cette même année 1609, par acte du 12 octobre, retenu par Ferrand, notaire à Libourne, Fortin Videau, sieur de la Valade, donne trente sous de rente annuelle à Saint Jean, à condition d'une grand'messe avec diacre et sous-diacre, le premier vendredi de l'année, au grand autel de l'Église, un Exaudiat pour la santé du Roi et un Libera devant la chaire, lieu où il était enseveli.

Le dix-huitième siècle se déroule ; la chapelle de l'Épinette n'a plus qu'une existence silencieuse et obscure, comme celle de ces peuples heureux qui n'ont pas d'histoire. Le 13 février 1790, un décret de l'Assemblée nationale abolit les ordres religieux et les églises deviennent propriété nationale. Au mois d'octobre 1793, les cloches de la chapelle, comme celles des autres églises, sont fondues pour être converties en canons et en monnaie de billon.

Le 21 septembre 1793, les magistrats municipaux de Libourne se transportent dans la chapelle de l'Épinette, appartenant à la nation, dit le procès-verbal, et en présence de la citoyenne veuve Peychès, gardienne de la chapelle, font l'inventaire du mobilier et des effets publics, lesdits effets, pour plus grande sûreté, ont été transportés dans le dépôt aux ci-devant Ursulines pour y être vendus avec les autres effets.
Dans le même temps, une autre Commission municipale, dont faisait partie le notaire Janeau (Noël), était chargée d'un mandat pareil à l'église Saint Jean.

Que se passa-t-il là alors ? Y eut-il débat, contestations, violence ? Quoi qu'il en soit, le brave notaire Janeau resta en possession de l'Épine qui, dans le désordre du moment, fut brisée par le milieu en deux fragments.

Après le rétablissement du culte par Bonaparte (15 mai 1801), Janeau voulut se décharger de la relique précieuse. Le 5 frimaire an XII (dimanche 27 novembre 1803), procès-verbal en forme fut dressé de la remise faite par le notaire Janeau, en présence des Administrateurs de l'église Saint Jean. Copie de ce procès-verbal fut envoyée à l'archevêque de Bordeaux d'Aviau du Bois de Sanzay, ce prélat savant et vénéré, dont le catéchisme fut seul autorisé pendant plus d'un demi-siècle, jusqu'au milieu de l'épiscopat du cardinal Donnet.
Les Administrateurs de Saint Jean firent placer l'Épine, dont les deux parties avaient été rejointes par une bandelette d'or, dans un reliquaire convenable et spécial.
Mgr d'Aviau ordonna une enquête, vint la présider au mois d'octobbre 1804 et fit constater l'authenticité de la relique. Il
prescrivit qu'elle serait portée processionnellement en ville les jours fériés de l'Église, Invention et Exaltation de la Croix, et le jour de la Saint Clair.
L'anneau d'or qui rejoignait les deux fragments de l'Épine avait été commandé à M. Pierre-Isidore Jalodin, habile joaillier-orfèvre, né à Montargis le 14 février 1785, décédé à Libourne le 20 mars 1868, marié le 19 avril 1808 et veuf, le 19 mars 1844, de Suzanne Peychès, dont nous avons retrouvé le nom lors du procès-verbal dressé à la chapelle de l'Épinette le 21 septembre 1793.

Depuis cette époque, l'Épine, qui n'avait jamais joui de la châsse princière que lui avait fait faire, en 1469, Charles, frère du roi de Louis XI, est restée obscurément dans le Trésor de l'église Saint Jean.

Ici entre en scène une personne dont nous devons parler, M. Paul Boutin qui est, avec le vénéré abbé Gabard, le véritable inventeur et promoteur de la résurrection de la chapelle de l'Épinette.
Le
14 janvier 1837, M. Paul Boutin resté veuf avec trois enfants, épousait en secondes noces Mlle Dorothée-Zélina Rougé, qui, devenue mère d'une fille, tomba, peu d'années après, gravement malade. Son mari fut conduit à chercher pour elle une résidence au grand air; un ami leur trouva une villa charmante, route de Montagne, appartenant à M. Viard, alors capitaine d'infanterie en activité, époux de Mlle Délezé, morte à quatre-vingt-douze ans le 25 novembre 1895. M. Viard, quand eut sonné pour lui l'âge de la retraite, vint s'installer dans sa villa et M. Paul Boutin dût chercher un autre lieu de villégiature.
Il le trouva dans une petite propriété, route de
Saint-Émilion, du même côté et à quelques mètres de l'ancienne chapelle de l'Épinette, propriété assez abandonnée, avec une maisonnette à rez-de-chaussée, fort mal entretenue; c'était une ruine neuve à côté de la ruine antique de la chapelle.
M. Paul Boutin s'y établit et en fit sa résidence habituelle favorite, tant à cause de la santé si compromise de sa femme, que pour se livrer librement à sa passion profonde de la chasse. Il s'en trouva si bien que, par acte sous-seing privé, enregistré le 22 janvier 1846, il en devint acquéreur d'un sieur Dupeyrat. Dès ce jour, la pensée maîtresse de sa vie, l'objectif constant de son activité, fut la réédification de la chapelle de l'Épinette. Quel fut son but réel, l'utilisation d'un voisinage important, les besoins de ses habitudes religieuses ? C’est un de ces secrets impénétrables de la conscience, où nul regard ne doit pénétrer.
L'état de santé de Mme P. Boutin s'était considérablement aggravé ; elle décéda le 25 décembre 1816. Le 17 janvier 1848, M. P. Boutin épousait en troisièmes noces Mme Irma Vinson, veuve P. Dordé, dont le domaine paternel se trouvait justement en face de la résidence de M. Boutin. Cette résidence, du reste, n'a nullement changé de forme, d'aspect et d'apparence; elle est restée identiquement la même et appartient aujourd'hui à M. Duperrieu, devenu adjudicataire après la mort de M. Boutin (24 mai 1876) à la barre du Tribunal, le 21 novembre 1876.
En 1853, M. Paul Boutin prenait à ferme le domaine de l'Épinette dont nous venons de parler...
Plus que jamais, M. Paul Boutin dirigea tous ses efforts vers les ruines de l'antique chapelle. Les visites, les conférences, les démarches devinrent incessantes avec M. Charriez, M. tabard, M. Chabannes, le cardinal Donnet. M. Gabard, curé de Saint-Ferdinand, dont la section de l'Épinette dépendait, s'intéressa beaucoup, et même très pécuniairement dit-on, à tous ces nombreux pourparlers.

Les héritiers David, avons-nous dit, étaient restés propriétaires des terrains et des restes de la chapelle. Par le partage intervenu entre eux devant Mme Brulle, le 25 septembre 1855, les derniers possesseurs étaient Françoise David, épouse Calamy et Marie Lande, veuve Jean David.
Le
5 mai 1856, M. Paul Boutin devenait acquéreur, devant Mme Dubreuilh-Bracher, de la part des héritiers David pour le prix de 4.500 fr, payé comptant.
Il s'agissait de réédifier la chapelle, œuvre considérable! Parmi les moyens d'action et de propagande, nous trouvons un habile ballon d'essai, inséré dans le Rosier de Marie, petit journal pieux, du 17 octobre 1863, un article très bien fait d'ailleurs et assez intéressant, signé Fanny Debuire; il se termine ainsi :
« L'Épinette est devenue un cellier; cependant, elle n'est pas dégradée au point de ne pouvoir être restaurée: Des constructions légères dissimulent seules les parties importantes de ce monument du Mille siècle qui mérite à tous égards d'être conservé. On nous affirmait, il y a peu de temps, que l'Administration diocésaine a l'intention de rendre la chapelle de l'Épinette à sa première destination; nous donnons pleinement notre assentiment à ce projet et nous ne doutons nullement que l'État d'abord et les vrais fidèles après l'État ne sempressent de seconder cette intention de haute piété. »
Fanny Debuire voulait dire M. Jecques-Bazile Délezé, ami intime et inséparable de M. Paul Boutin, né le 5 août 1786 à Libourne, où il est mort à quatre-vingt-dix ans, le 15 décembre 1876.

Quel avait été le bailleur de fonds? Aurait-ce pu être M. Boutin qui, père de quatre enfants, avait à supporter de lourdes charges de famille qui auraient rendu étrange un pareil sacrifice ? L'explication vraisemblable de cette situation se trouve dans le fait de deux actes passés devant le même notaire. Mme Dubreuil-Brachet, le 16 octobre 1868. Par l'un, M. P. Boutin fait donation pure et simple à M. l'abbé Gabard de ce qui avait été l'objet de son apparente acquisition du 5 mai 1856. Par un autre acte du même jour, M. Boutin vendait à M. Gabard à raison de deux francs le mètre, un terrain de forme rectangulaire, confinant aux terrains faisant l'objet de la donation précédemment faite, ayant 275 mètres 20 centimètres de superficie, pour le prix pavé comptant de 550 francs et 40 centimes. Cette coïncidence fait réfléchir et il ne serait pas impossible que la générosité dévouée de M. Gabard se soit donné ample carrière.

La reconstruction allait se faire, la chapelle allait ressusciter de ses ruines; les ouvriers étaient déjà à l'œuvre. Le 19 novembre 1868, le curé de Libourne vint en grande pompe étendre sa bénédiction sur les nouvelles constructions, et le dimanche 22 novembre 1868, le service religieux y était célébré et inauguré.
Ces petites réparations ne pouvaient être qu'un commencement. Le zèle de M. Gabard avait été couronné d'un succès grandissant toujours; il fallait un édifice spacieux et le 31 mars 1870 était posée la première pierre d'une nouvelle église plus appropriée aux besoins de la population; le 11 septembre 1875, le cardinal Donnet venait la visiter en personne et bénissait ses trois nefs.

Ce qui reste à exposer est presque contemporain. Un décret du Président de la République, du 23 janvier 1877, érigeait en succursale la nouvelle paroisse, et quelques gours après, M. l'abbé G. Moreau en était désigné comme desservant par le cardinal Donnet.
En 1886, la chapelle latérale des fonts baptismaux était édifiée et dotée d'un fort beau dallage.
En 1891, construction de l'abside et des sacristies, des voûtes, réparations et remise en état des parties anciennes des sculptures.
En mars 1896, commençaient les travaux du clocher ayant quarante-six mètres d'élévation et qui était terminé au mois d'octobre de la même année, grâce à la surveillance incessante et infatigable de M. l'abbé G. Moreau, qui a eu la joie, le 11 juillet 1897, de voir ses projets achevés recevoir la bénédiction de M. le vicaire général Berbiguier, ancien curé de Libourne.

L'ÉgliSe De L'ÉpiNette - 2007 L'ÉgliSe De L'ÉpiNette - Insciption sous le porche

L'ÉgliSe De L'ÉpiNette - Porte d'entrée

L'ÉgliSe De L'ÉpiNette - Intèrieur

M. Moreau peut être fier de son œuvre, si toutefois la fierté peut pénétrer dans un esprit actif, désintéressé, patient, modeste, persévérant et dont la conscience n'a eu qu'un but, la satisfaction de tous.
Mais ceux qui voient de loin, de tous les côtés de l'horizon, cette flèche blanche, élancée, légère, gracieuse, ne peuvent s'empêcher de remercier en leur âme le pieux promoteur de ce bel édifice.
M. Moreau avait trouvé comme une étable et une grange; ce sera son honneur et sa récompense de laisser une église, un superbe clocher, un monument, et à la fin des travaux, il a pu s'écrier avec le poète d'Athalie :

Quelle Jérusalem nouvelle
Sort du fond des déserts brillante de clarté !

Nous avons terminé ce résumé, peut-être trop long, de l'historique de la Sainte Épine et la chapelle de l'Épinette; peut-être pourtant ne lira-t-on pas encore sans quelque intérêt une rapide notice sur les choses et les hommes de la région.

Le 15 décembre 1818, le notaire Janeau (études Isambert, Vacher, Lewden, Ducasse, de La Crompe de la Boissière) dont nous avons cité l'heureuse intervention pour la conservation de l'Épine, annonçait par une affiche jaune que nous avons sous les yeux la vente en son étude, par adjudication à la chaleur des enchères, d'un domaine dit de l'Épinette, située dans la banlieue de Libourne.

Cette adjudication fut tranchée au profit d'un sieur Honoré Vinson, originaire d'Angoulême, dixième enfant sur dix-sept de Nicolas Vinson (La famille Vinson a joué un rôle important dans l'histoire de la ville d'Angoulême, depuis le XVe siècle. Les ancêtres directs d'Honoré Vinson, François Vinson de Beauregard et Guillaume Vinson de Fontorbière et La Chapelle, furent pairs et conseillers d'Angoulême) et qui était venu s'établir, aux approches de la Révolution, chez une tante, Marguerite Delalande, qui, elle-même, était venue d'Angoulême, au milieu du dernier siècle, se fixer à Libourne, où elle s'était rendue propriétaire, par suite de ses relations de parenté avec la famille Brachet.

Républiquain (sic) enthousiaste, comme l'étaient alors tous les jeunes hommes et comme il l'écrivait itérativement dans des lettres qui ont été publiées, Honoré Vinson prit part à plusieurs des grandes guerres de la République et de l'Empire, reçut en Espagne une blessure terrible qui mit sa vie en danger et dut borner sa carrière militaire ; il faisait partie de la 34 ème demi-brigade.

Désormais il habita définitivement Libourne, acquit le domaine de l'Épinette, puis, quelques années après, d'autres terres de M. Alezais et de M. Émile Leperche. Mort le 3 janvier 1847, M. H. Vinson eut pour successeur dans ses propriétés Mme Vinson, née Delalande, sa veuve.
Nous voyons apparaître ici
M. Paul Boutin dont nous avions dit que nous reparlerions et dont nous avons esquissé le rôle important au sujet de la restauration de la chapelle de l'Épinette.
M. Paul Boutin appartenait à une famille ancienne dont on retrouve les traces dans les archives dès le 09 juillet 1609 et qui, pendant plus de trois siècles, s'était persévéramment et honorablement livrée à la même industrie alimentaire. Cette famille si nombreuse et féconde semble avoir entièrement disparu de Libourne. M. Boutin avait quatre enfants, tous mariés dont il ne reste dans le pays aucun descendant. Son frère aîné, M. Simon Boutin, maire de Libourne, conseiller général, n'est plus représenté que par sa fille, belle-mère d'un général de division, inspecteur général de la cavalerie, qu'aucune attache spéciale, il semble, ne retient à Libourne. Nous avons suffisamment exposé l'influence exercée par M. Boutin sur les destinées de l'église de l'Épinette.

La façade de l'Église a pour aboutissants: au midi le chemin des Religieuses et le square ou carrefour formé par la route de Saint-Émilion, qui longe l'Église de l'est à l'ouest, et au nord la rue Honoré-Vinson.
Le terrain de ce carrefour, planté d'un joli bouquet d'arbres, entouré de maisons élégantes, doté d'une boîte aux lettres et d'un bureau de tabac, paraît avoir été donné à l'église elle-même par
M. Chaperon-Grangère
.
Nous allons passer rapidement en revue ces diverses voies.

La plus nouvelle, celle qui n'est pas encore intéressante et n'a pas d'histoire, est la rue Honoré-Vinson. En 1885, le propriétaire actuel du domaine de l'Épinette offrit à la Ville les terrains de deux rues, à la condition que ces deux voies porteraient, l'une le nom de son père, l'autre le nom de sa mère, qu'elles seraient pourvues d'éclairage et mises en bon état de viabilité.

La Ville accomplit régulièrement les deux dernières conditions. Mais la première ne marcha pas toute seule. Le Ministre de l'Intérieur demanda, au nom de règlements d'ordre supérieur, quels grands services avaient rendu ces deux personnes à la chose publique, quelle était leur grandeur historique. Le donateur fit observer qu'il n'avait été inspiré par aucun mobile de vanité résonnante, mais uniquement par un sentiment d'affection et de reconnaissance filiale. Le Ministre, convaincu, consentit et approuva.

Au-delà de l'Épinette, sur la route de Saint-Émilion, au Ruisseau-Vert, se trouve la demeure de l'énergique et infatigable collaborateur du grand œuvre de la réparation de la vieille chapelle, M. Moulinet. En face, on voit l'élégant et ravissant chalet à l'aspect seigneurial, avec sa haute tour crénelée, bâti par M. Combrouze, habité d'abord par M. Tristan de l'Hermitte. Nous avons parlé des visites du roi Louis XI à la chapelle de l'Épinette; était-il alors accompagné de son funèbre ministre, dont le lieutenant de dragons se croyait et se disait descendant ?

A l'extrémité sud du chemin des Religieuses, nous trouvons la demeure artistique de l'excellent et honorable capitaine des sapeurs-pompiers, M. E. Dupuis. En face, la délicieuse villa des anciens Gaston Lacaze, avec son bel appareil aérien élévatoire des eaux, ses magiques charmilles et son beau jardin, tracé au commencement de ce siècle par un architecte-décorateur parisien, aujourd'hui, propriété de M. Poitou, ancien conseiller général.

Puis vient un lavoir très fréquenté, qui donne du souci à la municipalité libournaise, et nous revenons au square dont nous venons de parler.
La voie la plus importante conduisant à l'Épinette est évidemment la route de
Saint-Émilion; nous suivrons son parcours depuis la ville.

A la sortie de la ville, vers Mandée, se trouvait à droite, près du mur de ville, une caserne ancienne en mauvais état, appelée de la Terrière (rue des Vieilles-Casernes, aujourd'hui rue Elisabeth-Gelly, du nom de la Sœur de Saint Vincent-de-Paul, bienfaitrice des pauvres et donatrice généreuse de la ville), dont la construction avait été autorisée par Tourny le 18 novembre 1757. La rue qui partait de la place de l'Hôtel-de-Ville s'appelait de la Terre (rue Périgueux, rue Gambetta) à cause d'un amoncellement de démolitions et de matériaux, formant un vaste monticule là où ont été bâtis la chapelle des Carmélites et le Haras. La nouvelle caserne de cavalerie, commencée en 1760, ne fut terminée par l'achèvement de la troisième aile que vers 1840.
En face la rue de la Terre commençait le chemin de
Mandée. Mandée était un tertre, une montée habitée par une agglomération de pauvres échoppes et de maisonnettes, surtout occupées par des tourneurs en chaises et des pailleuses ; tous travaillaient en plein air les trois quarts de l'année ; les chants et les cris joyeux y retentissaient sans cesse.
A l'entrée du chemin de
Mandée, à droite, sur l'emplacement de la maison Gragnon, se trouvait un vaste dépôt des fumiers de la garnison, appartenant à M. H. Moriac.
Toujours à droite, au bout du chemin de
Mandée
, avait été établie une modeste hôtellerie, que la création du chemin de fer a fait transformer en un vaste et magnifique hôtel de voyageurs.
A gauche, il ne reste des anciennes propriétés que la maison Penaud. Du même côté, en examinant les petits escaliers devant certaines maisons, on peut continuer par la pensée la déclivité de plus en plus forte, dont le point culminant se trouvait à l'endroit précis sur lequel a été construite la grande salle d'entrée de la gare.
Sous les fondations de l'hôtel Loubat passe le très beau et très solide aqueduc, dont le point de départ, situé en face du bureau de l'octroi, à l'Épinette, continuait la route, traversait la gare, passait devant la maison Duteuil, suivait la rue Gambetta jusqu'à la maison Jalodin, parcourait en biais la place et fournissait en abondance à la fontaine à quatre faces, qui se trouvait au milieu, cette eau pure, fraîche, limpide, salubre, irréprochable, qui, pendant plus de trois cents ans, a amplement satisfait à toutes les nécessités de la ville.

On sait qu'en 1854 les cabinets d'aisance de la gare ayant été construits au-dessus de cet aqueduc des infiltrations désastreuses se produisirent. Hippolyte Danglade, maire, fit aussitôt provisoirement fermer et condamner les quatre bouches de la fontaine de la place. M. Danglade espérait, mais sans réussir, pouvoir arranger toutes choses à l'amiable avec la Compagnie d'Orléans, comme le chemin dit Chaperon Grangère, la jonction des gares qui se fit à Coutras.

En s'éloignant du hameau de Mandée, toujours à droite, se trouvait la belle résidence de M. du Boscq, avec sa longue grille, ses beaux arbres de Judée et ses superbes orangers; il ne reste rien de cette demeure, située sur l'espace dont une partie est occupée par le bureau de l'octroi de la gare des marchandises.
La maison du
Boscq fut totalement démolie en 1853.

Nous arrivons au domaine de Beauregard, appartenant à M. Constant, père de M. François Constant, bienfaiteur de la ville. Acquis par M. Chaperon-Grangère, qui voulait créer une vaste exploitation en achetant à grand prix toutes les petites propriétés qui le séparaient de celle de M. Gaston Lacaze (M. Poitou), celui-ci devint maître de ce qui appartenait à M. Page-Lépine, dont la sœur, Mlle Désirée Page, tenait, sous le couvert de l'Hôtel-de-Ville, un bureau de tabac, le plus achalandé alors de Libourne, célèbre par la bonne grâce de la vendeuse et par le groupement qui s'y renouvelait sans cesse des anciens militaires et autres rentiers, qui agitaient indéfiniment les questions d'Etat, de guerre ou de paix et surtout la chronique des choses libournaises, politiques, commerciales et... scandaleuses.

Après la villa de M. Page venait, à l'angle du chemin des Religieuses, une autre propriété, appartenant à M. Viard, et aussi acquise par M. Chaperon-Grangère. Ce petit domaine avait appartenu à la famille Bouyer, famille respectée d'anciens magistrats, dont une descendante, Mlle Suzanne Bouver, fille de M. Jean Bouger et de Françoise Bourges-Saint-Genis, avait épousé, le 28 janvier 1816, le chef d'escadron Sylvestre Ubalde Piola. C'est à l'Épinette qu'était né, le 2 mars 1823, M. Albert Piola, ancien maire, l'une des notabilités les plus honorables de Libourne, décédé le 15 novembre 1891 dans son bel hôtel situé au coin de la rue Sainte Catherine et de la rue Président-Carnot; j'allais dire son palais, bâti vers 1820 pour le duc (alors comte) Decazes, Ministre de l'Intérieur, par un architecte et des artistes de Paris, sur l'emplacement même où avait habité son père Michel Decazes, Conseiller du Roi, Lieutenant particulier du Sénéchal et Président de Libourne, Procureur du Roi de l'Amirauté de Guienne, époux de Catherine Trigant.

En s'éloignant de Mandée, il n'y avait, du côté gauche, aucune habitation, aucune propriété qu'il y ait lieu de signaler. Sur le plateau culminant de Mandée était installée la corderie de M. Gurchy. De vastes chambres et hangars renfermaient les apparaux, outils, et les énormes torsades de chanvre, venues de Vendée, de Bretagne, de Russie surtout.

Les poteaux à râteliers sur lesquels tournaient les cordes en confection se prolongeaient jusqu'à l'Épinette. Que de fois un passant s'arrêtait devant ces vieux cordiers, marchant toujours à reculons, portant autour des reins une grosse ceinture de chanvre et répétant d'une voix monotone, par les grandes chaleurs, quelque chant patriotique, sous l'œil vigilant de M. Gurchy, membre (et non chevalier) de la Légion d'honneur, avec sa haute stature, son ample redingote, sa voix sonore, qui faisait fabriquer, à grand renfort d'innombrables torsions, ces énormes câbles pour les vaisseaux de guerre que les chaînes d'acier et de fer ont remplacés partout aujourd'hui. Le long de la route alors rien ne troublait les pauvres cordiers, sur tout leur parcours régnaient sans partage le silence, l'isolement et la paix.

Les choses, les lieux, les personnes, tout est bien changé. Le progrès, le luxe, le bien-être sont venus; faut-il regretter le passé? Ce serait un blasphème, mais il est bienséant de donner un souvenir pénétré et ému à ce qui est à jamais disparu, et à propos du chant des cordiers de l'Épinette, on se rappelle cette citation mélancolique de Chateaubriand, rencontrant près de Toulon un groupe de cordiers de la marine qui, cheminant lentement à reculons, répétaient en cadence la chanson attristée de Béranger, alors si populaire, du Vieux Caporal: "Un morveux d'officier m'outrage... Le vieux caporal doit mourir!"

Nous avons fait le tour de l'Épinette, le tour de bien des noms qui sont effacés ou qui s'effaceront, hélas! C’est la destinée fatale des choses humaines. Pourtant ces lignes seront lues peut-être par quelque esprit généreux qui verra, ce qui est vrai, qu'elles ont été écrites simplement avec la religion d'un passé respecté et le culte pieux du souvenir.

Hyacinthe VINSON.

L'ÉgliSe De L'ÉpiNette - HisToire (gauche)    L'ÉgliSe De L'ÉpiNette - HisToire (droite)

Plaques retraçant l'histoire de L'Église de l'Épinette
(situées à l'entrée du batiment)

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15 février 2007

LeS GRoTTeS De FeRRaND

St-Hippolyte - Grottes de Ferrand - A la fois mémorial et lieu d'initiation ce monument a été creusé au XVIIe siècle

Le terroir de Saint-Emilion abrite de nombreuses et inestimables manifestations de l'art et de l'activité des hommes qui, à toutes les époques, ont apporté à la ville et sa région son lot de monuments.

Mais il en est un qui reste ignoré du public et qui mérite d'être connu. L'historien qui révéla ce site ne fut autre qu'Emilien Piganeau. Il est paru depuis plusieurs publications apportant une vision très différente des grottes, de leur auteur, de leur finalité. Cette étude sommaire qui n'apportera rien de fondamentalement nouveau sur le sujet, a seulement pour objet d'offrir une synthèse des recherches déjà publiées. Enfin, j'essayerai, tout en recherchant ce qu'il faut garder de chaque auteur (et ce qu'il faut rejeter), de déterminer ce qui paraît le plus probable quant à « l'énigme Ferrand ».

C'est l’un des monuments les plus remarquables de la Juridiction de Saint-Emilion, un ensemble architectural fascinant, creusé face au midi dans une corniche calcaire qui domine la vallée de la Dordogne. Alternance du cercle et du carré, couloirs et autels cruciformes, salles en fer à cheval, loge ovoïde. C’est un univers poétique et sacré, envoûtant qui suscite maintes interrogations.

Plan des Grottes de Ferrand

DESCRIPTION

Le souterrain de Ferrand se trouve sur la propriété de « Château Ferrand », commune de Saint-Hippolyte, à trois kilomètres au sud-est de Saint-Emilion. Exposées au midi, les grottes ont été creusées au flanc du coteau calcaire, dominant ainsi la vallée de Saint-Laurent-des-Combes. Le site comporte trois niveaux:

- une partie haute, issue du plateau naturel où s'amorce un escalier d'accès,

- une terrasse principale d'une largeur moyenne de huit mètres, permettant l'entrée dans les diverses grottes,

- une partie basse où a été réalisé un bassin qu'alimente une source.

L'escalier d'accès La terrasse principale Le bassin

L'ouvrage, que l'on peut diviser en trois parties, est en fait composé d'un ensemble de cavités taillées de main d'homme dans la roche sur plus de 100 mètres.

La partie occidentale est composée de trois salles rectangulaires indépendantes. Celle de gauche n'a rien de spécifique, mais la seconde est cruciforme. Quant à celle de droite, elle est bordée de bancs taillés dans le roc.

Celle de gauche  Salle cruciforme   Celle de droite, bordée de bancs

La partie orientale comporte elle aussi trois salles: deux d'entre elles sont ovales (dans l'une d'elles sont creusées sept niches). La troisième, carrée, donne accès à une galerie de 33 mètres qui, avec la salle carrée, communique avec l'extérieur par neuf couloirs perpendiculaires.

Les sept niches  Salle des sept niches

Salle ovale  Terrase, devant l'entrée de la salle carrée

Intérieur salle carrée  La salle carrée donnant sur une galerie

Galerie de 33 mètres

La grande galerie imitant la galerie des glaces du château de Versailles.

Galerie

1ère porte des neufs couloirs  Vue de l'extérieure

Vue sur la vallée, face à la 1ère porte  Deux des neufs entrées de la galerie

La partie centrale, appelée le « labyrinthe », est la plus curieuse. Son plan, complexe, est composé de galeries qui s'entrecroisent. Le long couloir (27 m) qui relie les deux extrémités de cette partie centrale, comporte de part et d'autre un siège taillé dans la pierre, cloisonné avec une autre galerie, possédant elle aussi un siège. Cette cloison est percée de vingt trous régulièrement disposés. Ce dispositif est généralement appelé « le confessionnal ».

Entrée principale  Vue vers l'extèrieur

Au fond du couloir sur la gauche   Escalier pour resortir du labyrinthe   Au fond du couloir sur la droite

Couloir (partie droite)  ET MUSIS ET OTIO (Aux muses et aux loisirs)

partie droite     Dernier couloir (partie droite)      Un confessionnal

Au fond du 1er couloir (partie gauche)  Siège et ouverture entre deux galeries ( partie gauche)



HISTORIQUE

La première question qui vient à l'esprit lorsque l'on découvre ce site, à savoir quel en est l'auteur, on trouve une réponse immédiate à la lecture du testament d'Elie de Bétoulaud (A.D.G. 3 E 13.108 fol. 16 et suite (1705) - codicille 3 E 13.108 (1708) fol. 8 ou dans le bulletin de la Société des Archives Historiques de la Gironde, tome XIX, n° 164, Bordeaux, 1879, p. 386.):

"Je veux et entens aussy que mes héritiers et successeurs quy possèderont ma maison et seigneurie de Sainct Poly, près de Saint-Emilion, soient tenus d'employer tous les ans la somme de trente livres pour la propreté et J’entretiens des grottes magnifiques que j’ay faites creusées comme monuments éternels de la gloire du roy Louis le Grand, dans les rochers qui sont près de ladite maison..."

Elie de Bétoulaud (1637-1709) (ROQUETIE-BUISSSON (Vicomte de), Elie de Bétoulaud, Bordeaux, Imprimerie Gounouilhou, 1908) appartenait au milieu bordelais de la noblesse de robe et était lui-même avocat. Il se disait poète et fréquentait les milieux précieux parisiens. Il est à compter parmi les amis sincères de Mlle de Scudéry, dont il reçut estime et affection. Il partageait sa vie entre ses deux propriétés de Saint-Hippolyte, Bordeaux et la capitale où il côtoyait la cour. Ami de Conrart, Segrais, Fléchier, Mascaron, Chapelain, il connaît le confesseur de Louis XIV, le Père Lachaise, et la duchesse de Lorraine, à qui il a dédié des épîtres. Il prit parti pour Fouquet lors de son arrestation et pleure la mort de Pellisson.

Grottes_de_Ferrand___000bis

Outre 1'«édification» de grottes comme hommage à la gloire d'un Roi, les manifestations de l'originalité de Bétoulaud ne manquent pas. Dans son testament toujours: "Comme (..) je souhaiterois de ranimer dans ma patrie l'amour presque éteint des belles lettres et quy ny ont este guere cultivées que par l'illustre Paulin, par le fameux Ausone, par Michel de Montagne et par Moy, je donne et lègue pour tous les ans, à perpétuité, une bague de diaments de la valeur de trente pistoles à celuy ou celle qui né ou née à Bordeaux ou dans toute J'ancienne sénéchaussée de Guyenne, aura au jugement de Messieurs de l'Académie françoise de Paris, composé à la louange d'une des plus belles actions de ce grand Roy, la plus belle pièce de poésie françoise..."

Nous avons dans ses écrits de nombreuses traces de son excentricité, qui, par endroit, peut paraître visionnaire. Il aurait bien vu en Bordeaux la capitale d'un seul royaume composé de la France et de l'Espagne par l'union des trônes. Le plan de la ville nouvelle qu'il décrit recoupe par bien des aspects ce que les intendants de Guyenne feront plus tard de Bordeaux.

Mais tous les rêves poétiques de Damon (Bétoulaud) se concrétisent dans cette entreprise extravagante que sont les grottes. Voici ce à quoi elles ressemblaient tel que nous l'apprend l'opuscule de Bétoulaud intitulé: « Description des grottes ou du labyrinthe de Damon » (Signalons que cet opuscule a été perdu depuis. Nous devons donc croire en la justesse des propos du Vicomte de Roquette-Buisson.)

"En sortant de la maison de Damon, qui est sur un costeau fort élevé, on passe dans un parterre en terrasse dont la vue, qui forme un quart de cercle, est parfaitement belle par les différents objets qui la composent. De ce parterre, on passe dans un bois de chesnes dont les allées forment un berceau fort exhaussé; du bois dans une longue allée à hautes palissades de charmes, et du milieu de cette allée dans une autre, au bout de laquelle on trouve une petite terrasse ballustrée en demi-rond, d'où J'on descend à droite et à gauche par deux routes ménagées entre les rochers et des arbres verts qui forment une manière de fer à cheval et qui conduisent, de chaque côté, par une pente fort douce et quelques marches fort commodes, à une grotte fort grande et fort claire".

St-Hippolyte - Grottes de Ferrand - Parterre en terrasse

On découvre ainsi "l'agréable vue d'une grande et belle plaine, meslée de terres, couverte de blés, de vignes, de bois, de prairies, de villages, de châteaux, de plusieurs tours et détours de la Dordogne", tout cela se terminant "par les beaux costeaux des pays d'entre-deux-mers, ce qui forme une espèce de vaste théâtre de cinq à six lieues (20 à 25 km) de tour".

De cette première grotte, on passe de plain-pied sur une autre terrasse jadis balustrée comme la première et de chaque côté de laquelle Bétoulaud avait créé deux cabinets de verdure à grands piliers de pierre joints par des barreaux de bois peints et formant deux ovales garnis d'orangers.

Au-dessous de la terrasse, s'étendait une vaste pièce d'eau alimentée par une source toujours claire, toujours pure, sourdant d'un rocher qui surplombait. Dans cette pièce d'eau, Damon fit rouler du haut du coteau de grosses roches qui en formaient le pourtour "ce qui avec le lierre qui s’y est meslé en quelques endroits, donne à ce lieu un air très agréable quoique sauvage en quelque façon".

De chaque côté d'une deuxième terrasse, quatre marches conduisaient à droite et à gauche à deux portes de fer grillées derrière lesquelles s'étendait avec symétrie le labyrinthe. Deux galeries hautes de huit pieds (2,65 m), larges de six (2 m), avec des arcades jadis soulignées de coquilles argentées, s'enfoncent encore, tout comme autrefois, durant 30 pieds (10m) dans le roc. Dans des niches régulièrement creusées de chaque côté, Damon plaça des orangers et intercala, sur les pilastres qui les séparaient, des bustes de héros et de dieux, Mars, Hercule, César, Auguste, avec, au fond, celui du grand Roi, le tout encadré de grandes coquilles couleur de rose, "si bien que ce mélange, régulier de bustes blancs, de rochers verdâtres, de coquilles argentées et couleur de rose ou mouchetées de noir .et d'orangers verts chargés de fleurs et de fruits font un effet qui surprend et frappe d'abord ceux qui n'attendent pas, en entrant en ce lieu-là, tant de propreté dans un rocher".

Plus loin, se trouvait une petite pièce ronde pour quatre ou cinq personnes, ornée de coquillages et de branches de corail, et dont la corniche était garnie "de limaçons d'Orient, de coquilles tigrées et de coupes de marbre serpentin, d'albâtre, de nacre, de cristal et de porcelaine". C'était là le cabinet et le salon dédié à Sapho (Mlle de Scudéry). Sans aucun doute, Bétoulaud espérait-il y recevoir sa fidèle amie. Mais rien ne permet de penser que ce rêve se réalisa. Mlle de Scudéry n'abandonna pas les rives de la Seine, tout en se montrant fort sensible à cette galanterie, ainsi qu'en témoignent plusieurs de ses madrigaux. Dans l'un d'eux, elle rapporte l'existence de volières dont ne parle pas Damon : "Il y a mesme de petites volières ménagées dans le roc à l'ouverture des fenêtres, remplies de sérins qui font un concert délicieux" (SCUDERY (Mlle de), Nouvelles conversations de morale, Paris, Imprimerie du Roy, 1688.)

Le grand roy avait lui aussi sa chapelle en ce rustique rocher; la gauche du labyrinthe était entièrement consacrée à son culte, "à cause de la beauté du rocher". Avec ses pilastres, le salon qui y était aménagé en son milieu "a, nous dit-il, l'air d'un petit temple et la lumière qui le pénètre par une fenêtre carrée, se condense au fond par un ovale de quatre pieds (1,35 m) qui projette toute la clarté sur un beau bas-relief du grand Roy, placé dans une niche et entouré de festons de coquillages brillants et argentés, Damon n'étant pas assez riche pour le couronner de diamants".

Cet ensemble ne parut pas suffisant à Damon et il imagina, à la louange de Louis XIV, un suprême et dernier effort. Si on pénètre, en effet, jusqu'à l'une des extrémités des deux premières galeries, on trouve un couloir intérieur unissant l'une à l'autre, les deux parties du labyrinthe (c'est le couloir d'entrée actuelle). Les deux parois extrêmes en sont percées de trous réguliers, formant par leurs entrelacs des L majuscules entrelacés. Ces petites ouvertures communiquent avec le fond latéral des deux galeries extrêmes du labyrinthe et la lumière pénètre par ces trous dans le couloir intérieur. "Elle éclaire, nous dit alors Damon, ces trois chiffres lumineux du nom du Grand Roy qui semblent estre composés d'étoiles brillantes ou de flammes de feu quand le soleil donne sur les fenêtres des grottes, effet surprenant et admirable". D'aucun nomment, ce dispositif "le confessionnal" donnant ainsi une destinée pieuse à une flatterie profane.

D'autre part, deux inscriptions rappellent les desseins de Damon. Sur la porte du labyrinthe de Sapho, on lit : « ET MUSIS ET OTIO » (Aux muses et aux loisirs). Sur l'autre: « ET VIRT. AETERN. LUDOVICI MAGNI » (A la vertu éternelle de Louis le Grand) pour témoigner, dit Bétoulaud, "que ce lieu est consacré à la vertu éternelle de Louis le Grand, aux muses et au loisir, afin qu'on y célèbre toujours en paix la gloire de ce héros."

Outre la grotte lyrique (parce que faite en forme de lyre) et diverses salles que l'on garnissait d'orangers et de jasmins d'Espagne, Damon créa une longue galerie qui, telle un cloître, ouvre en plein roc ses larges arcades sur la plaine de la Dordogne et "ce qui rend cette galerie très agréable, c'est qu'estant tout à fait libre en été, elle sert d'une riante et spacieuse promenade et qu'on y met des deux côtés, durant l'hivers, deux rangs de grands orangers entrelacés de divers pots de jasmins d'Espagne, de lauriers roses et autres fleurs qui craignent le froid... "

Joignez à cet ensemble de belles carpes qui viennent se disputer le pain qu'on leur jette dans la pièce d'eau et sur le haut du rocher "un petit bois charmant coupé confusément de petites routes tournoiantes".

Tout cela, il faut en convenir, justifiait presque la joie orgueilleuse que manifeste Bétoulaud en nous décrivant les grottes de Ferrand. "On est surtout obligé d'avouer, dit-il en terminant, qu'il a fallu beaucoup de travail, beaucoup de dépenses, beaucoup d'application et beaucoup de temps pour achever un si grand ouvrage dans un rocher qui était, en certains endroits, aussi dur que le fer même, mais Louis le Grand a tout fait surmonter et Damon a cru qu'il ne vivrait ni ne mourrait content s'il ne marquait par quelque chose d'éternel, son zèle et son admiration pour le plus grand des Rois".

L'entretien des grottes après la mort de Bétoulaud fut peu ou mal exécuté. Les propriétaires, émigrant à la Révolution, négligeront cette tâche à leur retour. Rien ne subsiste plus de ces délicatesses maniérées et surannées que Damon, sans se lasser, admirait. Le rocher est devenu aussi rustique que jadis; ainsi, la nature reprit-­elle ses droits.

La question du modèle auquel a pu se référer Elie de Béthoulaud n'avait jusqu'alors pas eu de réponse. Marc Favreau y répond en partie et avance une hypothèse qui est d'autant plus digne d'intérêt qu'elle est à mon avis pertinente (FAVREAU (M.), Les Jardins de Gironde au XVIIe siècle, Mémoire de D.E.A. d'Histoire de l'Art moderne et contemporain, Université de Bordeaux III, 1990.) : "Il suffit de se replonger dans certaines grandes œuvres du XVIIe siècle, pour comprendre pourquoi ces grottes ont été creusées. L’Astrée influence fortement l'aristocratie européenne du XVIIe siècle. Ce roman-fleuve, vaste poème lyrique, descriptif et dramatique où l'amour apparaît sous toutes ses formes, raconte l'histoire de la Gaule au Ve siècle après J.-C."

Dans toute l'Europe, des groupes se constituent afin de faire revivre ces aventures romanesques. "Parfois, les lecteurs du roman prennent plaisir à se substituer en imagination à leurs héros, à rêver une vie à l'image de la leur et à se divertir quelques instants en portant leurs noms évocateurs, en tenant leurs rôles et en partageant leurs peines et leurs enthousiasmes. On joue le personnage de d'Urfé dans le parc et dans les jardins, près des grottes artificielles, des bosquets ombreux et des fontaines limpides" (LA THUILLIÈRE (R.), La Préciosité, Genève, 1966, p. 328) « Ainsi, il est fort possible que Bétoulaud, accompagné d'amis, se soit promené à Ferrand, habillé en berger ou en druide » (M. Favreau).

Or, il est certain que Bétoulaud a lu l'Astrée. Le Vicomte de Roquette-Buisson affirme même que la lecture de cet ouvrage a marqué notre homme. Il existe d'ailleurs dans l'Astrée plusieurs Damon. L'un, héros de l'Aquitaine, est chevalier et a pour fonction principale de combattre et d'aimer.

Il est dans l'ouvrage d'Honoré d'Urfé, un passage transposable à Ferrand: "...on entroit dans le jardin agencé de toutes les raretez que le lieu pouvait permettre, fut en fontaines et parterres, fut en allées et ombrages (...). Au sortir de ce lieu, on entroit dans un grand bois de diverses sortes d'arbres, dont un quaré estait de cou­driers, qui tous ensemble faisoient si gracieux dédale (...). Assez près de là, dans un autre quaré, estoit la fontaine de l’Amour, source à la vérité merveilleuse (...). A J'autrequaré, estait la caverne de Daman et de Fortune, et au dernier, J'antre de la Vieille Mandrague(...). Outre que par tout le reste du bois, il y avait plusieurs autres diverses grottes si bien contrefaites au naturel que J'œil trompait bien souvent le jugement" (URFE (H. d'), L'Astrée, tome I, Lyon, Masson, 1926, p. 37.)

D'Urfé décrit plus loin ces grottes plus précisément: « L'entrée estait fort haute et spacieuse aux deux costez, au lieu de piliers, estoient deux termes (Pan et Syrin­gue) qui sur leur teste, soustenoient les hauts de la voulte du portail (...), (et) estaient fort industrieusement revestus de petites pierres de diverses couleurs (...). Le tour de la porte estoit par le dehors à la rustique, et pendèrent des festons de coquilles rattachez en quatre endroits finissant auprès de la teste des deux termes. Le dedans de la voulte estoit en pointe de rocher, qui semblait en plusieurs lieux dégoutter desalpestre (...). Ce lieu tant par dehors que par dedans, estoit enrichy d'un grand nombre de statues, qui enfoncées dans les niches, faisaient diverses fontaines et touttes représentaient quelque effet de la puissance d’Amour". On découvre à nouveau combien les similitudes avec Ferrand sont nombreuses.

Plus loin, Marc Favreau propose: "La galerie aurait accueilli les orangers du labyrinthe et serait une serre, conçue peut-être d'après les théories de la Quintinie" (QUINTINIE (J. de la), le Parfait jardinier, Paris, 1695)

St-Hippolyte - Grottes de Ferrand - Vue sur la vallée

   

L'ÉNIGME FERRAND

Parler d'énigme quant aux grottes de Ferrand est inattendu. Cependant, une étude sur le site serait incomplète sans rendre compte de la littérature fantasmagorique qui aborde la question.

M. Michel Audouin n'hésite pas à affirmer (AUDOUIN (J.M.), Les Grottes de Ferrand, Opuscule n° 5 du Club de Recherches et d'Exploration Souterraines, 1984) que « Ferrand n'a pas une histoire mais des histoires, L'invisible aux yeux y est plus présent qu'il n’y paraît, c'est un lieu de connaissance et de savoir, chaque pierre et chaque mur valent plus que des livres ». « Aux forces de l'invisible, monument d'une technologie ignorée, Ferrand sait donner, lorsqu'il le faut, toute sa magnificence. »

Le ton est donné! Toutes les extrapolations sont alors possibles. M. Gérard de Sede (SEDE (G. de), Saint-Emilion insolite, Bordeaux, Imprimerie Pujot, 1980), affirme que Bétoulaud n'a point fait creuser les grottes: "Mais si, en disant qu'il les a fait (sic) creuser, il a voulu nous faire croire qu'elles n'existaient point avant lui, alors, il s'est vanté, manifestant, comme d'habitude, sa mégalomanie".

L'auteur fait remarquer que "Naguère, les habitants du pays appelaient d'ailleurs les grottes de Ferrand Grottes des druides", tout en rapportant une phrase de l'article de Piganeau en la déformant dans le sens de son propos.

M. de Sede pense que "le nom des grottes que nous venons de décrire provient d'un nom de personne". Puis il nous rapporte que "Ferrand, culdée écossais (qui) passa les dernières années de sa vie dans une grotte d’Aquitaine" (SEDE (G. de), Saint-Emilion insolite, Bordeaux, Imprimerie Pujot, 1980), tout en proposant l'hypothèse de René Guénon: "Il n’y a rien d'invraisemblable à ce qu'il y ait eu derrière l'Eglise culdéenne un ordre non plus religieux mais initiatique". Ce qui conduit à l'hypothèse suivante: "La grotte de Ferrand est-elle ainsi nommée parce que ce fut celle l'ermite culdéen Ferrand finit ses jours ?"

Ferrand devient ainsi « un ancien lieu d'initiation» orné des principaux symboles maçonniques: « chaire », « étoile flamboyante », « acacia », « pierre cubique ». "Si ces grottes avaient été consacrées par les druides, il ne serait pas étonnant que l'ermite culdéen de Ferrand les ait choisies pour retraite. Puis, les siècles ayant passé mais la tradition demeurant, les grottes de Ferrand durent servir de lieu d'initiation à des francs-maçons de rite écossais".

Cette thèse fantaisiste a eu un certain crédit puisqu'elle est sympathique à M. Michel Audoin et qu'un journaliste l'a relatée (DEMPSTER, Histoire ecclésiastique d'Ecosse, 1628). Ce dernier ne présente pas même Bétoulaud comme un hypothétique constructeur des grottes. Il réactualise le problème et se demande si l'on n'y pratiquerait pas encore "à l'écart des curieux une magie venue du fond des âges."

Cette thèse fantaisiste rassemble tous les lieux communs de la littérature fantasmagorique: druidisme, ésotérisme, franc-maçonnerie... et c'est regrettable, Reste cependant que le problème posé de l'existence hypothétique de quelque cavité ou souterrain antérieur à 1'« édification» des grottes est intéressant. Stéphane Rous­seau (Article de D. TERS dans le journal Sud-Ouest du 11 août 1983) précise que "certains détails font croire à l'existence d'un souterrain antérieur à l'époque du creusement du labyrinthe. Ainsi, par exemple, une galerie ovoïde (voir schémas), de largeur d'homme, creusée en diagonale nord/sud, et qui débouche sur l'extérieur". (Dans l'axe du bassin d'eau). Bétoulaud lui-même ne disait-il pas dans un recueil poétique que l'''on trouvait, au bas d'un creux mal ébauché, des sauvages Sylvains un asile caché."

L'occupation du lieu semble ancienne. Témoins ces trouvailles archéologiques faites au bas de la colline au siècle dernier: une sépulture d'enfant contenant une agrafe wisigothe, et préhistorique: des grattoirs, lames et outils divers en silex probablement de l'Aurignacien trouvés en 1950 sur le site et exposés au musée de Saint-Emilion.

Il est d'autre part vraisemblable que les grottes aient eu une quelconque utilisation après la mort du poète Bétoulaud. Je pense à cette inscription latine gravée dans la pierre: « OLIM ET MUSIC ET OTIO, NUNC AMORI ET VENERI » (Autrefois, on cultivait ici les loisirs et les muses; on honore à présent l'amour et Vénus).

inscription      St-Hippolyte - Grottes de Ferrand

   

CONCLUSION

Nous découvrons en définitive que chaque auteur a un certain mérite. Emilien Piganeau a eu celui de « révéler » le site. Sans le Vicomte de Roquette-Buisson, nous ne connaîtrions que partiellement les grottes telles que Bétoulaud les a conçues. Son témoignage a d'autant plus de valeur que sa source a depuis disparu. Vient ensuite chronologiquement Gérard de Sede, dont les propos, malgré tout sympathiques, ont contribué par une relative diffusion à faire connaître Ferrand. Quant à Michel Audouin, celui-ci a, avec le C.R.E.S., pratiqué sur le terrain de remarquables relevés topographiques. Restent les deux dernières publications: celle de Marc Favreau et de Stéphane Rousseau. Malgré les précédentes publications citées, ils ont su faire progresser la connaissance du site, et, pour la première fois, un article concernant Ferrand a dépassé le cadre régional.

Enfin, tous ont été séduits par ce monument qui se dégrade lentement et qui, d'aucun l'ont signalé, nécessite une sauvegarde. En effet, le calcaire s'effrite de façon inégale en divers endroits et les racines des arbres font par ailleurs éclater la roche.

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(Il est a signaler également que d'autres grottes, sous la végétation, sont présente dans les environs - 500 mètres non loin de là - comme nous le montre la photos ci-dessous)

Dans les coins de St-Hippolyte

3 février 2007

3 MiLLionS de FoYerS éTeinTs

PluS Qu’Un SymBoLe, Un SiGnal ForT

Sources :

http://www.amisdelaterre.org/Participez-a-la-plus-grande.html 

http://www.amisdelaterre.org/3-millions-de-foyers-eteints-plus.html

« Il ne s’agissait pas d’économiser 5 minutes d’électricité uniquement ce jour-là, mais d’attirer l’attention des citoyens, des médias et des décideurs sur le gaspillage d’énergie et l’urgence de passer à l’action ! 5 minutes de répit pour la planète : ça ne prend pas longtemps, ça ne coûte rien, et ça montrera aux candidats à la Présidentielle que le changement climatique est un sujet qui doit peser dans le débat politique.

Courbe 01 février 2007 17h00

http://www.rte-france.com/htm/fr/vie/courbes.jsp

Le Réseau de Transport d’Electricité (RTE) reconnaît : « Cette baisse correspond à la consommation de l’éclairage et des appareils en veille d’environ 3 millions de ménages ». Avec une économie d’environ 800 mégawatts, la consommation française d’électricité a baissé de plus de 1% entre 19h55 et 20h, soit l’équivalent de la consommation totale de la ville de Marseille ou de la production d’un réacteur nucléaire.

Cette baisse est équivalente à la consommation d’une ville comme Marseille.

Merci à tous ! »

1 février 2007

Le 1er FéVrieR : éTeinS La LuMière !

Participez à la plus grande mobilisation citoyenne contre le changement climatique !

5 minutes de répitLe 1er février 2007 entre 19h55 et 20h00, l'Alliance pour la Planète (groupement national d'associations environnementales) demande à tous d'éteindre appareils en veille et lumières pour permettre à tous les citoyens de montrer leur mobilisation contre le changement climatique.

http://www.lalliance.fr/

www.lalliance.fr   www.amisdelaterre.org

27 janvier 2007

DiS !! C’eSt Quoi CeTTe BouTeiLLe de ViN !?!...

…Une bouteille de vin est un récipient généralement cylindrique à sa base et qui se resserre à son sommet. Une bouteille classique comprend un corps, ou ventre, surmonté du goulot, plus étroit, lui-même terminé par le col qui reçoit le bouchon. Le fond de la bouteille, ou cul, ou culot, est généralement bombé vers l'intérieur. Les bouteilles de vin sont en verre ou en plastique (pas le « grand cru » bien sur). Par métonymie, le terme de bouteille désigne aussi son contenu (comme c'est le cas de « verre ». On dit par exemple « boire une bonne bouteille »… pfff et comment qu’on fait les bébés ??

Et heuu !! Combien contient une Marie-Jeanne ? Béé heuu !!

Où peut-on voir cette bouteille, leurs différentes tailles ainsi que leurs noms de bouteille, pouvant contenir du vin de Bordeaux ?

Ces photos ont été prises dans la salle de consultation, 1er étage de la Médiathèque Municipale Condorcet de Libourne, place des Récollets. Vous pouvez voir ces bouteilles aux heures d'ouverture de la Médiathèque. (mardi 10h00 à 17h45, mercredi 10h00 à 12h00 - 14h00 à 17H45, vendredi 10h00 à 11h45 - 14h à 18h45, samedi 10h à 16h45) ainsi que de nombreux ouvrages et notamment sur le vin, la vigne, la viticulture, l'histoire locale...

Contenance

Équivalence

Bouteille de bordeaux

19,25cl (20 cl)

1/4 bouteille

Quart ou Picollo

25 cl

1/3 bouteille

Chopine

37,5 cl

1/2 bouteille

demi ou fillette

75 cl

1 bouteille

Bouteille ou Bordelaise

1,5 l

2 bouteilles

Magnum

2,25 l

3 bouteilles

Marie-Jeanne

3 l

4 bouteilles

Double magnum ou jéroboam (champagne ou bourgogne)

4,5 l

6 bouteilles

Jéroboam ou Réhoboam (champagne ou bourgogne)

6 l

8 bouteilles

Impériale ou Mathusalem (champagne ou bourgogne)

9 l

12 bouteilles

Salmanazar

12 l

16 bouteilles

Balthazar

15 l

20 bouteilles

Nabuchodonosor

18 l

24 bouteilles

Melchior ou Salomon (champagne ou bourgogne)

3 janvier 2007

IllumiNations De NoëL

IllumiNations De NoëL - JanVieR 2007

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